Tribulations Sauvages aux Quatre Coins du Monde
Les Catlins, 1900 km² d’Ecosse au sud-est de la Nouvelle-Zélande. Les côtes des Catlins comptent parmi les plus découpées du pays et subissent l’influence des courants océaniques et des vents venus tout droit de l’Antarctique. Des eaux froides, brassées, riches en nutriments, de quoi donner l’eau à la bouche à tout un monde planctonique et, par le fait même, à toute une chaine alimentaire !
Ainsi, les oiseaux marins sont légions dans les Catlins. L’un des plus aisément reconnaissable car très répandu et peu discret est la sterne tara (Sterna striata). A la fin de l’hiver les couples commencent à se former ou à se retrouver, l’espèce est monogame et les partenaires restent souvent unis pour plus d’une saison de reproduction.
Les sternes revêtent alors leur plus beau costume : celui de Miss Catlins. La taille fine et gracile, une robe d’hirondelle d’un blanc immaculé, un diadème blanc ornant la tête noire dans un contraste parfait, tout y est, même cette habitude de brailler à qui mieux mieux en se pavanant sur les promontoires rocheux qu’offre la côte.
Les oiseaux multiplient alors les parades, en l’air avec des figures de voltige aérienne des plus impressionnantes, mais aussi au sol. Les couples se lancent dans un paso doble endiablé, trépignent, tendent le cou et se déplacent côte à côte, comme mus par un marionnettiste.
Ces comportements atypiques sont parfois combinés à des offrandes, le mâle vient conquérir sa promise, un poisson au bout du bec.
Mais cette pratique n’est pas toujours couronnée de succès et attire la convoitise, des congénères désireux d’un repas gratuit mais aussi des voisins gênants comme les mouettes scopulines qui n’hésitent pas à se poser au milieu des colonies et à harceler les Romeos en herbe.
La sterne tara est relativement aisée à approcher, notamment grâce à une technique toute particulière que nous avons mis au point au fil du temps. L’astuce consiste à imiter un mammifère marin tel une otarie (Kekeno, le rocher à fourrure) venu se reposer sur les rochers puis à patienter à une vingtaine de mètre de la colonie. La marée montante est la clé du succès. Les oiseaux fuient devant les vagues par petits sauts jusqu’à se retrouver à quelques mètres seulement du photographe comblé par la proximité du spectacle, et le tout sans le moindre dérangement.
Dans tous les cas, si dérangement il y a, la nouvelle est vite répandue. A grands renforts de cris et d’attaques aériennes en piqué, les oiseaux chassent manu militari les éventuels suspects, humains compris. Mais inutile d’en arriver là, pourquoi se fatiguer à les pourchasser quand il suffit de jouer au phoque pour immortaliser la miss sur son plus beau podium, un rocher des Catlins.