Tribulations Sauvages aux Quatre Coins du Monde
Sagesse, force tranquille, longévité, mémoire… Dans l’imaginaire collectif, l’éléphant a droit à une place privilégiée. Symbole de prospérité pour de nombreuses tribus africaines, le mastodonte demeure un colosse aux pieds d’argile.
Son avenir sur notre planète est plus que jamais incertain. Chassé, traqué pour ses défenses, il a disparu au cours de ces dernières années de plusieurs pays : Gambie, Mauritanie, Burundi. En cause, une explosion du braconnage y compris au sein des territoires protégés et une réduction massive de son habitat naturel.
En Afrique du Sud, comme dans la plupart des états voisins, l’éléphant n’est présent qu’au sein des parcs nationaux. Parmi eux, le parc d’Addo est reconnu pour sa population importante. Pourtant c’est sans grand espoir qu’en 1931, Sydney Skaife, naturaliste de renom et créateur du parc tente de sauver les 11 éléphants restant dans le Zuurberg.
Victimes des hommes du major Pretorius mandaté par les fermiers de la région pour l’extermination des pachydermes qui s’en prennent aux cultures, ils sont aujourd’hui 600 à parcourir les 1640 km² du parc. C’est ici que nous avons eu la chance de rencontrer les géants de la Terre.
Difficile de mettre des mots sur les émotions que peuvent procurer une telle rencontre. A la lisière de la forêt, d’énormes masses grises et ocres glissent entre les branches.
Comment ces quatre tonnes peuvent elles être aussi discrètes ? Sans un bruit, les éléphants s’avancent dans la plaine. Il en sort de toutes parts, ils frôlent le sol, leurs pieds charnus amortissent les pas comme de véritables coussins d’air.
Menant vers les points d’eau, les pistes de terre rouge sillonnent le paysage, creusées par plusieurs générations de pachydermes.
Ces pistes sont également empruntées par d’autres animaux. Du buffle au phacochère en passant par la mangouste jaune ou le zèbre et le grand koudou, beaucoup d’espèces partagent ce sanctuaire.
Les mammifères ne sont pas les seuls à profiter de la quiétude des lieux. De nombreux oiseaux ont investi le parc d’Addo, dont la diversité d’habitats a permis à plus de 400 espèces de s’établir.
Une occasion de plus d’observer, de profiter des premières lueurs du jour devant le spectacle de la vie sauvage.
Nous avons passés plusieurs dizaines d’heures, enfermés dans notre aquarium de verre et d’acier. Des instants magiques durant lesquels nos yeux émerveillés n’ont eu de cesse de croiser ce regard doux, brillant, confiant, un regard d’éléphant.
Le plus marquant fut la nonchalance de cet énorme mâle, sûr de sa force, avançant lentement vers nous. À la fois subjugués et morts de trouille, nous resterons à jamais marqués par cette vision ; par la fenêtre, un paysage mouvant de nuances d’ocre et de gris, un immense éléphant à 2 mètres de notre voiture.
Fait surprenant, au sein du parc d’Addo comme dans d’autres parcs africains, de nombreux éléphants sont dépourvus de défense. Le braconnage en est une fois de plus la cause : les individus traqués et abattus sont porteurs des plus belles défenses, si bien que la population restante ne compte plus que des éléphants aux défenses réduites voire absentes (Nat Geo). Preuve que le braconnage ne se limite pas au simple retrait d’individus de la population.
Par chance, l’éléphant reste un emblème. Partout à travers le globe, des associations de protection de la faune sauvage se sont mobilisées. Des mesures de protection ont été prises afin de garantir un avenir au plus gros mammifère terrestre de notre planète. Des parcs sont créés, l’écotourisme se développe… Accusée d’être responsable de près de 70% du commerce illégal de l’ivoire, la Chine a interdit toute importation au premier janvier 2018. Malgré la lenteur des prises de décision, les générations futures auront peut-être la chance de pouvoir, comme nous, apprécier le spectacle magique d’un troupeau d’éléphants traversant la plaine.